Prédications Protestantes dans les Alpes du sud
Dimanche -27 Novembre 2011
Culte à Trescléoux (05700)

Lectures du Jour :
Esaïe 63,16-64, 7
Marc 13,33-37
1 PIERRE 1, 1-12
Au bénéfice d'un héritage
Frères et sœurs,
Nos lectures quotidiennes nous proposent à partir d’aujourd’hui la 1° épître de Pierre, que j’ai choisie comme thème de notre méditation ce qui nous permettra de la redécouvrir.
Le contexte
Cette lettre a été écrite plus d’1/2 siècle après la mort et la résurrection de Notre Seigneur, c'est-à-dire à peu près 20 ans après la mort de Pierre (en 64). Pierre et Paul ont été exécutés à Rome, sous Néron, avant la destruction du Temple.
Donc ce sont des disciples de Pierre qui rédigent ces 2 lettres parmi le plus tardives du N.T., lettres attribuées à Pierre par une filiation spirituelle et théologique ou plutôt christologique.
Elles s’adressent à des communautés de l’actuelle Turquie, les destinataires sont à la fois des frères autochtones issus des communautés crées par Paul et à des juifs de la diaspora née de la destruction du temple en 70 et d’une sévère répression dans ce que l’on appellera la 1° révolte juive qui se terminera par la prise de la forteresse de Massada en 74, dans laquelle tous les zélotes qui s’y étaient réfugiés, se suicideront..
Les références de notre passage à l’A.T. et aux prophètes sont destinées à ces judéo-chrétiens.
Ce texte aborde trois thèmes :
- Tout d’abord, celui de l’héritage, qui nous serait acquis dès aujourd’hui mais dont nous ne serons pleinement bénéficiaires qu’à la fin des temps,
- Mais il faut accepter que d’ici là nous puissions être « attristés » par des épreuves dont notre foi nous fera sortir vainqueurs.
- Enfin, Pierre développe l’idée que les prophètes de l’A.T. étaient déjà imprégnés de l’esprit du Christ dont, sans le savoir vraiment, ils annonçaient les souffrances et la gloire, et que cet enseignement de l’A.T. est aussi pour nous.
L’Héritage, l’espérance vivante
Si Pierre éprouve la nécessité de rappeler les fondamentaux de notre foi chrétienne, c’est que ses destinataires sont doublement déboussolés :
- La proclamation de leur foi les expose à des tribulations, qui peuvent aller jusqu’à la persécution,
- Et ils attendent toujours le retour du Seigneur, enlevé il y a plus d’1/2 siècle (« …lui en qui vous croyez sans le voir encore… » (v.8).
- Sans compter que nombre d’entre eux sont des « étrangers, dispersés » (v.1), selon son expression.
Alors il développe ce que Paul avait déjà écrit dans ses épîtres :
- Nous sommes les héritiers de Dieu, au même titre que le Christ, puisque par grâce nous sommes frères de Christ (Romains 8/17),
- C’est un héritage : nous y avons accès par la résurrection du Christ, par sa seule décision, nous n’y sommes pour rien, il ne doit rien à un quelconque travail de notre part. C’est comme chez le notaire, où notre nom apparaîtrait de façon totalement inattendue dans un testament. Un héritage, il n’y a qu’une chose à faire : l’accepter. Certains le refusent pourtant, ne voulant pas y croire, « c’est trop beau pour être vrai, il y a une arnaque là-dessous ». Eux seuls en endosseront alors les conséquences, à la fin des temps.
- Mais on sent une tension dans le développement de Pierre, car il doit concilier l’idée de cette grâce offerte tout de suite à celui qui croît, et l’idée du salut qui ne serait concrétisé qu’à la fin des temps, que ses lecteurs imaginent très proches (v.8), en tous cas se produisant de leur vivant, alors, cet héritage, nous n’en serrions aujourd’hui que les usufruitiers, la pleine propriété nous étant « réservée dans les cieux » (v.4).
- Cet héritage nous régénère, nous fait naître de nouveau, et suscite en nous une espérance vivante, une force intérieure qui elle non plus ne dépend pas de nous, qui ne déçoit pas, qui ne meurt pas, que rien ne peut corrompre ou altérer (v.4).
C’est ni plus ni moins que la liturgie du baptême, lorsque nous annonçons que l’enfant baptisé aura quoiqu’il advienne son nom inscrit de façon indélébile dans la communauté de l’Eglise.
Voilà de quoi méditer, dans notre société du tout jetable, de l’instantané. Savoir que nous sommes au bénéfice d’une alliance inaltérable, durable au-delà des générations, quelle joie intérieure, quelle jubilation cela peut procurer, quelle force, quelle énergie.
Les épreuves
Et voilà de quoi nous confirmer une nouvelle fois que si nous sommes dans le monde, nous ne sommes pas du monde.
Mais nous ne sommes pas retranchés du monde et nous sommes impliqués dans notre temps présent. Or notre foi en Christ n’a jamais été une assurance tous risques contre les dangers et les risques que le monde peut présenter, ni contre ce que l’on pourrait appeler « les forces du mal ».
Et si aujourd’hui les persécutions nous sont épargnées, ce que nous devons considérer comme une bénédiction, nous sommes appelés nous aussi à accepter l’épreuve du feu, ce moment où nous devons exprimer notre différence, rappeler autour de nous le projet de Dieu pour l’humanité,
Alors que nos contemporains recherchent l’absence d’effort, de douleur, d’attente, de prix à payer, condamnant l’humanité à une irréversible régression, notre espérance vivante nous permet non seulement d’accepter ces contraintes mais de les surmonter. Notre foi acceptant l’idée de subir ces épreuves, sait que nous en ressortirons plus forts, comme purifiés par le feu, avec la certitude que la puissance de Dieu nous garde jusqu’à la fin de notre parcours. Ainsi nous pouvons envisager l’avenir avec confiance et optimisme et contribuer à la construction du bien commun.
Mais attention à ne pas tomber dans le piège qui consisterait à penser que les souffrances, les épreuves endurées seraient le prix à payer pour notre salut. Pas de logique de rétribution dans nos relations avec Dieu, dans l’intercession du Christ en notre faveur. Ce que Paul a développé dans sa lettre aux Romains : « Car le salaire du péché, c'est la mort; mais le don gratuit de Dieu, c'est la vie éternelle en Jésus-Christ notre Seigneur. »
Cette précision nous permet de surmonter une ambiguïté qui pourrait naître d’une lecture rapide de Pierre : « Vous obtiendrez le salut de vos âmes pour prix de votre foi » (v.9) : Il faut lire : Parce que nous avons la certitude de notre salut, par notre foi, nous sommes effectivement sauvés, et non pas, vous obtiendrez un salut à venir en rémunération de votre foi.
Mais effectivement, devant des frères soumis à la répression, craignant pour leur vie, il est tentant de leur rappeler qu’après les épreuves, viendra le salut, dans une formulation qui pourrait prêter à confusion. Calvin écrivait aussi de telles lettres aux huguenots persécutés pendant les guerres de religion.
L’ancien Testament
Les 3 derniers versets de ce passage (v. 10 à 12) sont assez singuliers dans le N.T.
Pierre expose à des fidèles d’origine juive qui ne connaissent que l’A.T., en quoi cet A.T. est déjà ancré dans l’attente du Messie, celui-ci étant annoncé par les prophètes grâce à l’Esprit de Christ, déjà à l’œuvre depuis l’origine des temps (ce qui est développé tout au long de l’évangile de Jean : en particulier l’annonce de Jean-Baptiste)
En ce premier dimanche de l’avent, il est bon de se rappeler que ces prophètes qui annonçaient les souffrances de Christ suivies de sa gloire, attestent la continuité du dessein de Dieu pour l’Humanité qui trouve son accomplissement dans cette incarnation que nous célébrerons une nouvelle fois dans 4 semaines.
Jésus n’est ni un prophète de plus, ni un homme singulier choisi par Dieu, Jésus est l’incarnation même de ce principe divin que ni notre imagination ni notre intelligence ne peuvent concevoir, mais que notre intime conviction, notre foi permettent d’approcher. C’est ce qui fait de Noël un événement unique pour l’humanité, c’est ce qui distingue la théologie chrétienne de toute autre : L’entité que nous reconnaissons comme la créatrice de l’Univers par son seul verbe, est venue à notre rencontre par cette incarnation en son fils Jésus le Christ, pour construire ensemble un projet pour l’Humanité.
Ainsi effectivement, comme ¨Pierre l’écrit au v.12, c’est bien pour nous que les prophètes ont fait ces révélations, c’est bien pour nous que les mages, qui n’étaient pas des rois mais des savants, se sont mis en route en suivant une étoile qu’ils observaient dans le ciel..
Conclusion
L’attente de la naissance du Christ recrée chaque année un climat de foi et d'espérance, et même de ferveur, c’est le regain de cette espérance vivante qui nous fait regarder l’avenir non pas comme une source de menaces, mais comme une promesse de grandes bénédictions :
Ce que Paul écrivait au Corinthiens : « Dieu est fidèle, il voua appelés à la communion de son fils Jésus Christ notre Seigneur, il vous affermira jusqu’à la fin ».
Amen !
François PUJOL.