Prédications Protestantes dans les Alpes du sud 

DIMANCHE 5 Juillet 2015

Culte à GAP (05000)

Textes bibliques:

Ézéchiel 2, 2-5

Marc 6: 1 à 6

2 Corinthiens 12, 7-10

Les deux méditations qui suivent, ont été préparées en commun par trois prédicatrices laïques, ainsi que la liturgie, et présentées simultanément, le 5 juillet, en nos deux temples, d’Orpierre et Gap.

Ma grâce te suffit 

Frères et sœurs,

La lecture de la seconde lettre de Paul aux Corinthiens nous fait découvrir un Paul qui parle à la 1ère personne, qui dit « je », « moi je ». Il va même plus loin, jusqu'à parler de ses drôles d'expériences et de la souffrance de ce qu'il appelle une « écharde » qui lui aurait été donnée par un ange de Satan....

En fait il ne parle de lui que pour mieux parler aux Corinthiens.

Car dans l'Eglise que Paul a fondée à Corinthe, les choses ont bien changé... le Saint-Esprit est aujourd'hui partout et mis « à toutes les sauces ». Les prières sont dites en public à grand renfort d'enthousiasme et d'exaltation. On rend grâce pour tous les exaucements, les réponses reçues... Chaque moment de la vie quotidienne est dirigée par l'esprit. Et l'on pourrait tout à fait imaginer que les Corinthiens remerciaient Dieu de leur faire retrouver leurs clés si elles étaient perdues, ou d'avoir empêché l'orage de se déclencher sur la ville. Rivalisant de piété, c'était à qui avait la plus belle vision des mystères du paradis et chacun devait y aller de son couplet sur les grâces ineffables des anges. Paul parlait lui-même de « super-apôtres »...

Et c'est donc là qu'il se fâche. Les Corinthiens ont des visions? Lui aussi, et au moins aussi belles que les leurs.

Ils croient en Dieu parce qu'il exauce toutes leurs prières, lui y croit malgré le fait qu'il ne les exauce pas toutes, justement.

Et il va parler de lui pour mieux leur faire comprendre ce que Dieu attend d'eux.

Il va leur expliquer comment il a été amené à changer son image de Dieu, à la convertir.

Il va parler de cette « écharde dans la chair» qui le faisait souffrir.

Tiens, notre curiosité s'éveille! Paul avait-il une maladie grave? Ou bien était-ce la séquelle de mauvais traitements qu'il avait reçus? A moins que ce ne soit la douleur de ne pas pouvoir convertir les juifs à l'Evangile? Ou encore tout le souci que lui causaient ces super-apôtres en « tourneboulant » (« dévariant » dirait-on dans le midi) les esprits des Corinthiens?

Peu importe.

Paul raconte comment il a prié Dieu trois fois de suite de le soulager de cette « écharde dans sa chair». Il raconte comment Dieu n'a pas exaucé sa prière et lui a juste dit « ma grâce te suffit car ma puissance s'accomplit dans la faiblesse ».

Et Paul témoigne alors de la conversion qui s'opère, « conversion » signifiant retournement, changement radical. Car c'est bien d'un changement radical d''image de Dieu que Paul nous parle.

Il écrit aux chrétiens de Corinthe que la grâce de Dieu, il l'a en effet reçue au moment où il n'était pas le célèbre apôtre Paul, mais au moment où il était un homme souffrant, faible et vulnérable.

Il l'a reçue alors qu'il attendait un exaucement très concret de sa souffrance: en être soulagé tout simplement.

Il l'a reçue là où il ne l'attendait pas mais alors qu'il l'espérait certainement le plus...

Cette grâce véritable, elle lui a suffi car elle a donné sens et force à son apostolat, sa mission auprès des hommes. Elle a donné sens et force à son apostolat car il l'a aussi accueillie avec confiance: « ma grâce te suffit ». Il serait désormais comme un vase fragile porteur de toute la puissance d'amour de Dieu.

C'est ainsi qu'il montre aux Corinthiens qu'il n'a pas besoin d'un Dieu surpuissant pour croire en lui. Il ne croit pas en Dieu parce que c'est utile ni pour obtenir la moindre reconnaissance parmi les autres. Il ne croit même pas parce qu'il en aurait besoin pour vivre.

Il croit parce qu'au cœur de sa prière solitaire il a entendu une voix. Ce n'est pas dans une foule, aussi spirituelle soit-elle, aussi pieuse et fidèle soit-elle que Dieu s'adresse à Paul, mais dans l'intimité, dans ce genre d'occasion où l'on est tout seul avec soi-même et avec Dieu. Lorsque les circonstances sont tellement dures, l'appel tellement pressant, la peur tellement forte que l'on voudrait en être délivré, c'est là au moment où nous sommes le plus vrais à nos yeux que se fait entendre cette fameuse voix intérieure. Et peu importe ce qu'elle nous dit, elle nous dit à chacun autre chose: ce que nous avons, à ce moment précis, et dans cette circonstance particulière besoin d'entendre. Et l'extraordinaire de ce texte n'est pas là où nous le cherchons, ni là où les Corinthiens le cherchaient, il est dans cette simple phrase: « ma grâce te suffit ».

Nous ressemblons finalement tous un peu à Paul et à l'inverse, lui aussi nous ressemble. Parce que tous un jour ou l'autre nous avons sans aucun doute fait l'expérience d'une conviction forte, irremplaçable et indéfectible. Une conviction différente pour chacun d'entre nous et qui fait de chacun d'entre nous des croyants différents. Mais cela importe peu, c'est là que se fait la rencontre avec Dieu.

Ne recherchons jamais les extases mystiques, ne nous glorifions jamais de nos prières exaucées, elles ne veulent jamais dire que nous sommes dans la vérité, ne recherchons pas Dieu à tous les coins de rues, ne faisons pas semblant de le voir et de le chercher là où il n'est pas. Mais soyons attentif au silence, à tous ces moments où nous nous croyons abandonnés, c'est là que Dieu se trouve.

Amen !

Isabelle CHRISTOPHE

DIMANCHE 05 Juillet 2015

Culte à ORPIERRE (05700)

Textes bibliques:

Ézéchiel 2, 2-5

Marc 6: 1 à 6

2 Corinthiens 12, 7-10

Lorsque je suis faible, c'est alors que je suis fort !

Frères et sœurs,

Cette affirmation de l'apôtre Paul nous paraît incompréhensible : enfin, force et faiblesse, ça ne va pas du tout ensemble !! Dans ce monde de compétition, de dominations, de mépris du plus petit, du maladroit, du plus pauvre, du différent, ces dix premiers versets du chapitre 12 de la seconde épître à l’Église de Corinthe sont absolument inacceptables pour ceux et celles qui veulent être à l'heure de ce qui nous est proposé comme mode de vie.

On enseigne à nos enfants, on nous répète sans cesse, et sans doute les Corinthiens étaient-ils dans la même situation, dans le même état d’esprit, qu'il faut être performant, rentable, il faut laisser l'autre de côté s'il nous empêche d'avancer… S'il y a des pauvres, des chômeurs, des isolés, ce sont des incapables, des faibles en somme, et ils n'ont pas leur place dans une société bien organisée ! Il n'y a donc rien à espérer quand on se trouve dans la situation de faiblesse ?

En fait, quelle est la signification des paroles de Paul quand il s'adresse ainsi aux Corinthiens ?

Cette deuxième Epître est une collection de lettres rassemblées en un texte cohérent qui traite de plusieurs aspects des relations de Paul avec l’Église de Corinthe :

--tout d'abord, Paul parle du ministère apostolique avec ses difficultés,

– puis de la réalité de ce ministère quand il s'agit d'exhorter la communauté au partage , en particulier avec l’Église de Jérusalem en difficulté,

– enfin, Paul fait apparaître l'autorité de son ministère apostolique s'exerçant dans la faiblesse.

Il faut replacer les choses dans leur contexte: n'oublions pas que cette Eglise de Corinthe est le fruit du travail de Paul ; celui-ci a séjourné longuement dans la ville auprès de la communauté chrétienne composée de convertis par la prédication de Paul.

Cette communauté chrétienne reflète assez bien la structure de la société corinthienne : celle-ci comportait une minorité de gens scandaleusement riches au milieu de la misère du plus grand nombre : des esclaves, des serviteurs, de petits employés mal payés...Cette cité cosmopolite était un centre intellectuel et religieux où toutes les philosophies et religions du moment étaient représentées. Et donc, dans une société assez laxiste et pervertie ( on disait péjorativement : « vivre à la Corinthienne»), la petite Eglise de Corinthe était soumise aux influences de philosophies et cultes à manifestations païennes qui l'agitaient fortement.

L'apôtre Paul a donc fort à faire vis à vis de faux prophètes, de prédicateurs qui se prêchent eux-mêmes, de gnostiques qui se croient en possession du salut futur, de juifs qui veulent imposer les pratiques juives ancestrales à l'ensemble de la communauté. Bref, ce sont là les adversaires dont parle Paul et qu'il combat en affirmant sa dépendance exclusive au Christ .Ainsi il veut à tout prix maintenir l'unité de cette Eglise et lui montrer le vrai chemin du Christ par l'admonestation, par l'exhortation, par des moments de colère, mais aussi de la tendresse car cette Eglise est un peu son œuvre.

Et même, Paul se met lui-même en jeu en parlant de lui et de son expérience spirituelle : il parle à la première personne « je » « moi, je », mais il ne se prêche pas lui-même, c'est pour montrer combien il est petit par rapport à celui qui l'envoie : le Christ. Paul met en œuvre toute un stratégie pour faire réfléchir les Corinthiens, pour les amener à changer leur regard :

Certains missionnaires venus après lui ont fait forte impression par leurs expériences et les titres dont ils se sont parés. Alors Paul a compris que lui-même ne faisait pas le poids et a décidé de se comporter comme ses adversaires : il se dévoile, il se met à parler d'une expérience spirituelle extraordinaire dont il ne s'était jamais vanté. Remarquons sa pudeur quand il dit : « je connais un homme en Christ » il est évident qu'il parle de lui-même. Paul a connu des expériences mystiques dont il n'avait jamais parlé pour ne pas attirer l'attention sur lui plutôt que sur le Christ. Car il connaît le danger de se fixer sur ces expériences.

De nos jours, nous connaissons bien cette façon d'être : combien de nos contemporains, si ce n'est nous-mêmes, vont dévoiler leur vie , leurs expériences, sur un réseau social, et se voient bien souvent interrogés, harcelés parfois sur des sujets qu'ils auraient préféré ne pas développer. Imprudence dans une société qui n'est pas bien différente de la société corinthienne du premier siècle de notre ère. Orgueil, où nous mènes-tu parfois ?

Paul écrit alors au verset 7 : « Cependant, afin que je ne sois pas empli d'orgueil pour avoir reçu des révélations si extraordinaires, il a été mis une écharde dans ma chair, un messager de Satan chargé de me frapper » (mot très fort dans le texte).

On se demande ce que pouvait être cette écharde dans la chair de Paul : un problème de santé, ou une infirmité grandissante, en tout cas quelque chose qui le faisait souffrir constamment et qui amoindrissait son ministère en lui enlevant du prestige aux yeux des Corinthiens.

Quelque chose qui l'humiliait profondément : est-ce son passé de persécuteur des Chrétiens, son caractère emporté, ou bien des accès de souffrance physique difficiles à contrôler ?

Difficile de s'accepter soi-même dans ce cas ! Les avancées de la psychologie montrent bien que pour accepter les autres, il est nécessaire de s'accepter soi-même !!

Et nous pouvons nous aussi connaître de ces épines dans la chair qui nous bloquent, qui nous humilient, qui parfois aussi empêchent les autres de nous accepter. Paul, comme chacun de nous, aurait aimé être un Chrétien triomphant, assuré que sa foi le met à l'abri des souffrances intérieures, qu'elle lui permet de vivre en paix , sereinement vis à vis des aléas des relations sociales, des échecs et des doutes . Paul, comme nous sans doute, aimerait bien voir l'accomplissement du règne de Dieu, être complètement Ressuscité avec le Christ ?

Faut-il donc admettre qu'un Chrétien sans fragilité ne peut pas comprendre les autres humains, et donc ne peut les aimer, parce qu'il sera trop écrasant, trop orgueilleux peut-être ?

Faut-il comprendre qu'une fragilité qui nous humilie nous permet d'être véritablement à l'écoute des autres, d'être véritablement chrétien ? Que cette faiblesse nous permet d'être humble serviteur ?

Et que malgré cela nous pouvons témoigner de notre fidélité au Christ, témoigner du message d'amour qu'il nous a laissé et ,comme Paul, prier, prier avec persévérance.

Et la réponse de Dieu est celle-ci : « Ma grâce te suffit » Quelle parole définitive pour notre foi ! Nous avons tout reçu de Dieu, vie et pardon, gratuitement, sans mérite ! Notre faiblesse n'enlève rien à notre titre d'enfant de Dieu, ne peut pas nous empêcher de continuer à témoigner d'une vie toujours en Résurrection avec le Christ, et cela est une bénédiction !

C’est dans les moments difficiles, les moments de peur ou de souffrance, au moment où nous nous sentons seul avec nous-mêmes et avec Dieu, au moment où nous sommes le plus vrai à nos yeux que se fait entendre une mystérieuse voix intérieure ; peu importe ce qu'elle nous dit, et à chacun elle dit autre chose, elle nous dit ce que nous avons besoin d'entendre : Une exhortation, une consolation, un envoi, une bénédiction.

Souvenons-nous de cette parole de Jésus : »Heureux, bénis, en marche, ceux qui mesurent leur pauvreté de cœur, le Royaume des Cieux est à eux » Ainsi prenons-nous place, humblement, dans le sillon de l'enseignement de Jésus le Christ qui, par l'intermédiaire de l'apôtre Paul, nous révèle l'inespérée bénédiction de la part de Dieu : « Ma grâce te suffit » !

Je vous invite à la prière :

Tu es là, Seigneur, Présence amicale, silencieuse,

Fidèle, dans la traversée de nos déserts, de nos souffrances,

Tu es là, mais nous l’oublions,

Mais nous ne le sentons pas toujours,

Mais nous ne comprenons pas pourquoi

tu sembles silencieux et inactif quand tout hurle au fond de nous.

Tu es là, notre Dieu et c'est cela l'important

Rien ne pourra nous arracher à toi

Rien ne pourra arracher ta promesse à ce monde

Tu es là Seigneur,

Plus que notre foi,

Plus que notre peur,

Plus que nos faiblesses

C'est cela qui compte.

Tu nous dis : « Ma grâce te suffit » !

Je veux vivre de cette Parole

Amen !


Claudie et Alexandra