Prédications Protestantes dans les Alpes du sud 

L'histoire de la Réforme et Calvin

Jean Calvin naît à Noyon en Picardie en 1509. Envoyé à Paris au collège de la Marche puis à celui de Montaigu, il mène des études de droit selon le désir de son père, puis se tourne vers les Lettres et vers l'Humanisme. Vers 1530, il écrit en latin sa première œuvre, un commentaire du De clementia de Sénèque, publiée en 1532. À cette époque, les idées luthériennes ont déjà gagné la France et les premières persécutions des adeptes hérétiques sont organisées. Durant ses études de droit, il est en contact avec de nombreux luthériens, professeurs ou étudiants, et cet étudiant brillant ne semble pas s'intéresser particulièrement à la doctrine de Luther.

Ce n'est qu'en 1534 qu'il passe brusquement à la Réforme. Il restera d'ailleurs très discret quant à cette conversion soudaine et définitive. Juriste et humaniste, sa soif de vérité est très forte et l'Église catholique de l'époque en pleine confusion ne peut probablement guère lui apporter de réponse. C'est finalement dans l'Écriture qu'il trouvera la vérité qu'il recherche
Il s'installe à Bâle à la demande de Guillaume Farel où il publie en 1536 son premier livre à caractère religieux, Institution de la Religion Chrétienne, dans lequel il propose un exposé systématique des idées de Luther ; il s'y adresse aussi à François 1er pour défendre les luthériens persécutés que le roi laisse envoyer au bûcher ; ce livre a une importance capitale et le fait reconnaître d'emblée comme un brillant théologien de la Réforme. Il n'y innove pas particulièrement (c'est un homme de la deuxième génération) mais il est un écrivain précis qui construit la théologie de la Réforme ; il retravaillera d'ailleurs cet ouvrage tout au long de sa vie à tel point que les 6 chapitres de départ passeront à 80 en 1564.
Écrit d'abord en latin, Calvin le traduit dès 1541 en français (cette langue est alors en pleine évolution) et ouvre ainsi une ère nouvelle : tous ceux qui savent lire pourront strucurer et développer leur foi à partir des Écritures ou des ouvrages de théologie (et pas seulement à partir des ouvrages de piété, comme auparavant).
Sa théologie, comme celle de Zwingli, s'enracine dans l'affirmation centrale de la souveraineté de Dieu qui s'exerce partout et sur toute sa création. Il partage avec Luther l'affirmation, corollaire de la première, que l'homme n'est justifié que par la seule grâce de Dieu par le moyen de la foi en Jésus Christ. Une troisième conviction l'anime, l'autorité de la Bible est souveraine en matière de foi et de règle de vie, placée donc au dessus de celle de l'Église.
De théologien, il devient pasteur en 1536 à Genève, ville gagnée aux idées de la Réforme grâce à Farel. Puis banni de la ville en 1538 par le Conseil des Deux-Cents qui n'accepte pas la discipline ecclésiastique qu'il propose, Calvin se retire à Strasbourg où il exerce la charge de pasteur jusqu'en 1541 et seconde le réformateur Martin Bucer.
Rappelé en 1541 à Genève par les Genevois, il reste dans cette ville jusqu'à sa mort en 1564 ; peu à peu et en dépit de l'opposition fréquente des magistrats, il y exerce un véritable magistère moral en appliquant une discipline assez stricte ; il transforme l'Église et la Cité en essayant de moraliser les pratiques et d'y faire régner plus d'équité (refus des prêts à taux d'usure abusif, valorisation de tout travail, idée majeure que la pauvreté n'est pas à comprendre comme une conséquence inévitable du péché). Il contribue à donner de la religion réformée une image de rigueur.
En 1559, son effort d'organisation religieuse aboutit au Synode de Paris, qui réunit les représentants de diverses branches de la Réforme et qui publie quarante articles résumant la doctrine réformée.
Ce premier synode adopte la Confession de foi dite Confession de foi de La Rochelle.
De santé fragile, Calvin mène pourtant de front à Genève un prodigieux travail d'écrivain très fécond (ouvrages de théologie, d'exégèse, de commentaires bibliques, de correspondances...), et un travail débordant de pasteur (l'un de ses amis le surnomme "Arc toujours tendu").
Genève devient aussi un lieu d'accueil pour les réformés qui sont persécutés dans les autres pays.
Calvin prend une part prépondérante à l'organisation des Églises réformées partout en Europe et surtout en France ; contrairement à Luther et à Zwingli qui n'ont quasiment jamais quitté leur pays natal, il voyage beaucoup : en plusieurs régions de France, en Suisse, en Italie à Ferrare, en Allemagne pour assister aux colloques de Hagueneau, de Worms, de Ratisbonne tenu entre catholiques et protestants en 1541 à la demande de l'Empereur d'Allemagne.
Cette connaissance qu'a Calvin des principaux pays européens de son temps lui sera précieuse tout au long des nombreuses relations épistolaires avec les autres réformateurs. En effet, la plupart des réformateurs du XVIème siècle se connaissaient et s'étaient même rencontrés au moins une fois. Calvin n'a pas eu l'occasion de rencontrer physiquement Luther, mais les deux hommes correspondaient entre eux.
On ne peut passer sous silence l'histoire de Michel Servet, point noir dans l'histoire calviniste : Pas plus que Luther, Calvin n'était parfait et la mort de Michel Servet reste une marque d'intolérance difficile à comprendre aujourd'hui : né en Espagne en 1511, Servet est un médecin qui publie en 1531 un ouvrage dans lequel il discute le dogme de la Trinité. Chassé d'Allemagne, il se réfugie en France où il est arrêté ; il s'évade et rejoint Genève, où Calvin le fait emprisonner. Servet refuse de se rétracter, il est condamné par le Conseil de Genève et brûlé vif avec ses écrits le 27 octobre 1553. Calvin laisse faire. (Albert Cruvellier-1895).
Seul Sébastien Castellion s’opposera à Calvin et Farel pour défendre Servet, avec cette phrase devenu universelle « Pour moi, tuer un homme, ce n’est pas défendre une idée, c’est tuer un homme ».
L’affaire Servet marque une bascule entre un moyen âge dont Calvin était encore totalement imprégné et la Renaissance, puis le siècle des Lumières dont Castellion fut un éclaireur malheureux, car on ne s’oppose pas à Calvin impunément.

La fin de sa vie sera attristée par les guerres de Religions qui éclatent en France et c'est Théodore de Bèze qui lui succèdera à la tête de l'Église Réformée après sa mort en 1564.

De son œuvre, Karl Barth écrit : J'y discerne, sans prétendre être complet, une insistance vraiment majestueuse à magnifier la souveraineté et la providence de Dieu, source de toute réalité ; un jugement sobre et clairvoyant sur la grandeur et la faiblesse de l'homme (...) ; un récit à la fois fervent et grave des péripéties de la vie du chrétien avec Dieu ; un sens efficace de l'Église et de son comportement (...) ; un amour royal de la vie ; un art de saisir conjointement la part de Dieu et la part de l'homme dans le christianisme.

(Voir Musée virtuel du Protestantisme)