Prédications Protestantes dans les Alpes du sud
DIMANCHE 30 novembre 2014
1° Dimanche de l’Avent
Culte à Trescléoux-05700

Lectures du Jour :
Esaïe 63,16-64-8
Marc 13, 28-37 (voir également sous cette référence, prédication du 15 Novembre 2009)
1 Corinthiens 1, 3-9
Oh! Si tu déchirais les cieux, et descendais !
De prime abord, on pourrait se demander si ce texte d’Esaïe 63 et 64 est bien adapté à ce premier dimanche de l’Avent.
Ce texte est une prière, une prière de repentance, de confession des péchés, dans laquelle Esaïe est sincèrement consterné, désespéré, de la situation dans laquelle se trouve son peuple aujourd’hui. : « Nous avons péché, nos fautes nous emportent comme le vent. ».
Et le Peuple s’étant éloigné de Dieu, Esaïe déplore, dans un long soupir, l’absence apparente de Dieu : « Reviens, pour l'amour de tes serviteurs, nous sommes depuis longtemps comme un peuple que tu ne gouvernes pas, et qui n'est point appelé de ton nom, mais tu as été irrité, parce que nous avons dévié. »
On dit souvent que Dieu est une absence et les chrétiens que nous sommes passent leur temps à chercher des signes de sa présence, cherchent à rompre ce silence apparent de Dieu.
Mais ce n’est pas Dieu qui est absent, c’est nous, nous qui nous sommes éloignés de Lui, alors, oui, du coup, il n’est plus là quand nous aurions besoin de sa présence.
Et alors, Esaïe se souvient des temps heureux, des temps bénis où le peuple marchait au côté de son Seigneur, et où ses bénédictions étaient visibles, ce temps où tout allait si bien : Sortie d’Égypte, traversée de la Mer rouge, traversée du désert, conquête de Canaan, et toutes ces victoires, chute de Jéricho, etc…
Et c’est alors que la prière d’Esaïe se transforme en un long soupir de regret de ces temps heureux.
Lequel d’entre nous n’a pas soupiré en ces temps de disette, devant nos temples vides se rappelant les temps heureux, ces temps de Réveil qui ont périodiquement ébranlé notre région.
Mais la situation n’est jamais totalement désespérée tant que nous restons ancrés dans notre foi. C’est cette foi, cette « espérance malgré tout », cette volonté de vivre près de son Seigneur qui permet à Esaïe d’avoir ce sursaut, ce cri : « Mais Notre Père c'est toi, Toi qui, dès l'éternité, es notre sauveur », et puis : « c’est sur ces chemins d’autrefois que nous serons sauvés ».
Non la situation n’est pas désespérée, tant qu’il reste des veilleurs comme Esaïe, ou des Antoine Court au temps de la Révocation, ou plus près de nous (et de chez nous) des Felix Neff, Charles Cook, Samuel Vernier, Jean Cadier, qui ont pu répondre à cette question, en Esaïe 21/11 : « Sentinelle, que dis-tu de la nuit? » La sentinelle répond: « Le matin vient ». Le matin vient, c’est justement le titre d’un livre de Jean Cadier sur les brigades de la Drôme et ce Réveil des années 30 dans le Diois.
La parabole de Marc
Oui, le matin vient et avec lui cette aube nouvelle, cet instant magique, tant attendu, auquel seuls participeront ceux qui sont éveillés.
Et puis il y a cette parabole dans Marc 13 :
« Prenez garde, restez éveillés car vous ne savez pas quand ce sera le moment. » La lecture d’aujourd’hui nous contraint à clarifier pour nous quel sens nous donnons à ce « retour » de Jésus, puisque c’est de lui qu’il s’agit. Ce moment décisif où chacun apparaîtra « au grand jour » dans sa vérité toute nue, sans aucun faux fuyant possible.
Mais aujourd’hui, après 2.000 ans, nous ne sommes plus dans l’impatience d’accueillir le retour du Seigneur, comme les premiers chrétiens auxquels le texte de Marc s’adresse. Au contraire, nous nous y sommes habitués, au point que cette question est rarement soulevée dans nos méditations, comme si cette question était devenue seconde, alors que dans notre Credo, nous redisons chaque fois « il viendra de là pour juger les vivants et les morts ». Qu’est-ce que cela veut dire pour nous aujourd’hui ?
Or Marc nous met en garde contre cette accoutumance à l’éloignement du maître qui nous a laissés libres de toute initiative, libres de gérer sa création en héritiers responsables.
Sans qu’on y prenne garde, cet éloignement nous arrange, au point même que secrètement nous espérons qu’il ne revienne pas tout de suite pour nous laisser le temps de mener à leur terme nos petites affaires.
Sommes-nous des veilleurs ?
Seulement, quand Jésus dit « je vous le dis à tous : Veillez », le à tous, il est pour nous. Alors, préférons-nous dormir dans le confort de la nuit, ou rester éveillés, le cœur ouvert et disponible pour discerner dans la nuit de ce monde, les lueurs, les signes avant-coureurs de cette Aube Nouvelle ?.
Veillez donc, vous ne savez quand il vient. Mais il vient !
Et là se pose une question assez fondamentale pour la façon dont nous vivons notre foi, c’est de savoir si Jésus vient ou s’il revient. Et ce n’est pas uniquement une question de traduction ou le plaisir de jouer sur les mots. Car si nous avons la conviction que Jésus revient, en réalité on pense futur : il va revenir, il reviendra.
Alors que Jésus parle au présent, dans Jean 14/15-18 : « Je ne vous laisserai pas orphelins, je viens à vous. Encore un peu de temps, et le monde ne me verra plus; mais vous, vous me verrez, car je vis, et vous vivrez aussi »
Il vient, c‘est au présent, il est peut-être déjà là, alors la question est vraiment d’être en éveil, attentif à sa présence et surtout de savoir si nous allons l’accueillir, le recevoir, en nous, dans notre cœur, car c’est par le cœur que l’on accueille Jésus, non par l’intelligence. C’est cet accueil seul, qui peut transformer nos vies.
Et l’on peut se rappeler ces paroles des compagnons d’Emmaüs : Alors ils se dirent l'un à l'autre : « Notre cœur n'était-il pas brûlant en nous, tandis qu'il nous parlait sur la route ?». Et nous aussi, allons-nous vivre avec ce regret terrible et dire « il était là et nous ne le savions pas ».
Et puis surgit le cri d’Esaïe :
Esaïe s’écrie alors : « Ah ! si tu déchirais les cieux, et si tu descendais ! »
En cette période de l’Avent, ce cri en forme de soupir d’Esaïe est le nôtre. Nous savons qu’à Noël, Dieu exauce la prière d’Esaïe et déchire les cieux. Il est descendu parmi nous. Il s’est incarné en notre humanité. Il est devenu Emmanuel, Dieu avec nous, Dieu présent dans un nouveau-né, le fils de Marie, ce Dieu tout-puissant a connu la fragilité humaine des tout-petits. Malgré nos fautes, disait Esaïe, malgré cette incapacité humaine qui est la nôtre, de rester auprès de Notre Seigneur, ne serait-ce que par la prière.
Malgré ce soupir, malgré ce cœur gonflé de larmes et de regrets, Esaïe garde espoir, car viennent ces paroles d’apaisement « Cependant, Eternel, tu es notre Père. Nous sommes l’argile, et tu es notre potier. » Et Dieu a donné vie à cet argile en lui transmettant son souffle. Ainsi, nous ne sommes pas seulement ses créatures, mais aussi ses enfants. Rendez-vous compte, nous avons en nous le souffle divin !
Ce temps de l’Avent renouvelle en nous l’attente de voir la prière d’Esaïe exaucée. Ce temps de l’Avent est une porte qui s’ouvre un peu plus, dimanche après dimanche pour accueillir celui qui vient.
Mais il vient à l’improviste, au milieu de la nuit ou au chant du coq, sous la forme d’un petit enfant et non pas d’un roi, non pas dans un palais luxueux, mais dans une étable, non pas à Jérusalem, la capitale, mais à Bethléem, petite ville anonyme de Province, selon la prophétie de Michée (5/2).
Alors, qui le reconnaîtra ?
Des bergers, de simples bergers.
Amen !
François PUJOL