Prédications Protestantes dans les Alpes du sud 

25 décembre 2006

Culte de Noël à Gap (05000)

Textes bibliques:

- Esaïe 62, v. 11 & 12

- Hébreux 1, v. 1 à 6

- Matthieu 2, v. 1 à 12

Jésus, quel roi ?

Il nous arrive parfois de pester, même silencieusement, en regardant l’état du monde ; ou même certaines situations de notre vie ; oui, il nous arrive de pester en nous demandant peut-être ce que fait Dieu.

Et chacun d’entre nous échafaude une théorie là-dessus, sur Dieu qui est tout-puissant mais qui n’a pas les mêmes réponses que celles que nous attendons…ou sur Dieu qui nous laisse maintenant être les seuls acteurs de ce monde…

Et on se prend parfois à rêver en se disant qu’au moins, si Dieu venait sur terre, ou encore si Jésus revenait, ce ne serait plus pareil…

Oui, on se prend à rêver de quelque chose de grandiose, d’un monde où Dieu serait le patron… d’un monde où Il serait aussi présent que du temps d’Abraham, Moïse…ou Jésus…

Mais lors de ce type de rêves, n’est-on pas totalement en train de refaire l’histoire ?

Parce que Noël est la fête de l’abondance, la fête des retrouvailles, la fête de la lumière, on peut vite oublier que nos noëls sont loin d’être les conditions de la naissance de Jésus ; et que le monde contemporain de Jésus a vécu l’horreur.

Mon tableau de ce matin peut paraître noir ! Pourtant, je crois qu’il est bon à Noël de se remémorer tout le ministère de Jésus, de sa naissance à sa résurrection, pour non seulement ne pas être déçu du décalage entre nos attentes et la réalité, mais encore pour mieux vivre ce que le Dieu de Jésus Christ peut et veut réellement nous apporter.

Je développerai avec vous deux points.

Le premier sera : Jésus, né quel roi dans quel monde ?

Le second sera : Jésus, quel roi pour nos vies, quel roi pour le monde ?

Nous refaisons parfois l’histoire ; notre mémoire trahit parfois nos envies, nos rêves. Le passé a toujours été meilleur que le présent !!

Pourtant, réfléchissons. Le contexte religieux, mais surtout politique de l’époque contemporaine de Jésus n’était guère fameux.

Vous le savez, l’invasion romaine faisait que les juifs attendaient un libérateur ; un libérateur politique.

Ils attendaient quelqu’un de fort, avec un pouvoir guerrier, qui aurait le dernier mot sur tout ce qui les asservissait…

Curieusement, mais avec un vrai sens théologique, ce ne sont pas des juifs qui vont les premiers rendre leurs hommages à Jésus !

Et ainsi , ce n’est pas exactement le roi des juifs que l’évangéliste Matthieu va présenter. En effet, ce n’est pas un hommage rendu par les chefs des juifs qui va être rendu à l’enfant ; Jésus est reconnu là par des étrangers, c’est-à-dire des idolâtres !!

Et ce n’est pas anodin. Le fameux roi des juifs est en fait celui qui vient pour tous, pour les nations païennes, pour un monde qui, dès le départ, va lui être hostile, mais pour lequel le Puissant va veiller, déjouant les projets criminels de ses adversaires.

Jésus, né quel roi pour quel monde ?

Ne refaisons pas l’histoire.

Jésus arrive dans un contexte politique extrêmement tendu.

Va-t-il libérer ce peuple juif de l’oppression ? Non.

Va-t-il libérer tous ceux qui souffrent ? Non.

Va-t-il guérir alors tous ceux qui souffrent physiquement ? Non.

Va-t- il rétablir dans leur dignité tous ceux qui sont bafoués ? Non.

Va-t-il donner du pain à tous ceux qui ont faim ? Non.

Va-t-il guérir tous ceux qui souffrent psychiquement ? Non…

Le voilà, le fameux roi tant attendu

Alors, Jésus, quel roi dans quel monde ?

On peut dire un monde torturé. Un monde où l’insécurité est permanente.

Un monde douloureux où la mort est omniprésente, et où la peur est quotidienne.

Un monde où la culture juive est écrasée ; un monde où, si les nouvelles ne vont pas aussi bon train qu’aujourd’hui grâce à internet, la souffrance est monnaie courante, et où le désespoir est quotidien.

Un libérateur ferait du bien ; un bon coup de poing sur la table de la part de Dieu serait une bonne chose !!!

Voilà donc exactement ce qu’attendent les juifs ; un bon coup de gueule de Dieu qui balaiera toutes les douleurs et autres usurpations.

Le voilà, le monde de Jésus.

Et, voici la réponse de Jésus. Minuscule ; infiniment petite.

Un guéri par là ; un crouton de pain multiplié par ci ; une rencontre de ce côté ; une parole échangée de l’autre ; un lépreux guéri ; un démoniaque relevé ; une femme pardonnée…

Seigneur, par rapport à toute une humanité qui souffre, ce n’est pas un peu maigrelet ?

Ca fait petit quand même, pour Dieu qui vient lui-même se faire chair et os pour nous rencontrer !!

Alors, quel roi pour quel monde ?

Je dirais un monde de douleur, d’atrocités, de guerre et de violence, et un roitelet ; même pas un roi. Enfin…un roi qui écoute, un roi qui accompagne ; un roi qui a compassion ; un roi qui pleure… pas grandiose tout de même !

Et les conditions de sa venue ? Une mangeoire à bestiaux, on fait mieux comme trône.

Et comme palais royal : pas une pierre sur laquelle poser sa tête !!

Et comme moyen de transport ? Un ânon ; même pas un cheval.

Ah ! il est beau le roi ; et son royaume, excellent !!!

Ne refaisons pas l’histoire. Si Dieu s’était révélé tel qu’Il doit être, alors, il n’y aurait plus de place pour l’humanité.

Hans Joans, juif allemand, dit que si Dieu apparaissait dans toute sa grandeur, l’humain ne pourrait exister. Il serait étouffé.

Alors, Dieu-le roi se fait petit ; il laisse l’humanité exister. Avec ses qualités comme avec ses défauts. Avec ses joies comme avec ses souffrances.

Voilà donc les conditions de sa venue : venu semer quelques graines : celles de la réconciliation ; et non celles du droit du plus fort. Celles de l’amour, et non celles de la guerre. Celles de la paix, et non celles de la haine.

Alors, nous voilà dans le deuxième temps : Jésus, quel roi pour nos vies, quel roi pour le monde ?

Dieu, nous le percevons parfaitement avec cette fragile incarnation, ne se fait pas Dieu écrasant. Il se fait Dieu présent ; Dieu respectueux. Cherchez dans une autre religion une image de Dieu telle que celle-ci, vous ne la trouverez pas. Elle est quasiment blasphématoire.

Mais voilà Noël ; dans nos vies, pour nos vies, Dieu se fait Dieu de la rencontre en tête-à-tête. Dieu se fait Dieu du crouton partagé ; Dieu se fait Dieu du compagnonnage, comme Jésus l’a fait sur le chemin d’Emmaüs ; Dieu se fait miracle d’un sourire ou d’un pardon ; Dieu se fait encouragement d’initiatives en faveur de l’humain relevé.

Si Dieu devait être Dieu, nous serions écrasés par sa puissance et sa grandeur.

Alors, pour notre monde, aujourd’hui, le Dieu de Jésus-Christ est Celui qui n’a pas encore le dernier mot ; l’humain ne pourrait subsister.

Mais…mais, je crois réellement que depuis le ministère terrestre de Jésus, depuis cette naissance un peu miteuse, c’est le courage qu’Il nous donne ; c’est sa présence qu’Il nous offre ; c’est son feu qui fait avancer qu’Il nous confie.

Moi, pourrait dire Dieu, si je venais sur terre, ma présence écraserait tout de puissance. Mais vous, qui faites un tant soit peu confiance en moi, je vous confie des fruits, des clés, des solutions, des idées de partage ; des souffles de monde meilleur ; oh ! Ne vous gargarisez pas trop vite ; c’est moi qui souffles sur vous ; et c’est vous qui mettez en œuvre !!! »

Alors, quel roi pour nos vies ?

Un Dieu qui, pour le monde, s’écrase, pour ne pas écraser l’humanité.

Un Dieu qui, dans notre vie personnelle, notre vie quotidienne, nous assure qu’un plan de paix, que des projets bons sont offerts pour chacun de nous.

Un Dieu qui, en Jésus-Christ, nous donne une force extraordinaire pour que nous devenions des artisans ; artisans de paix ; artisans de partage ; artisans de sourire ; artisans de vie.

Et c’est à chacun d’entre nous, dans nos vies, de décider de la taille du trône du roi.

C’est à chacun d’entre nous de réfléchir pour savoir quel espace de parole nous laissons au Christ dans nos existences.

Voilà alors le roi de Noël ; qui nous dit :

« Toi, lève-toi ; l’amour que je te porte est immense ; ne le garde pas pour toi. Le monde a soif ; le monde a faim.

Si je suis le roi de ta vie, alors ta vie deviendra comme un jardin au milieu du désert. Et chaque pette victoire, et chaque humain relevé, et chaque femme qui sourira, et chaque homme qui reprendra courage, et chaque enfant qui rira à nouveau à gorge déployée, ce sera la victoire du roi, le roi de paix, le roi d’amour né dans une mangeoire, monté sur un ânon, mort sur une croix.

Mais n’oublie pas, quand ta vie te décourage ; n’oublie pas quand tout paraît désespéré ; quand tout paraît mort : je suis ressuscité. »

Ca aussi, c’est la bonne nouvelle de Noël.

Joyeux Noël ; Amen !!


Nathalie Paquereau.