Prédications Protestantes dans les Alpes du sud 

DIMANCHE 6 AVRIL 2014

Trescléoux (05700)

Textes bibliques:

Ézéchiel 37, 12-14 (voir également méditation du 29 Mars 2020)

JEAN 11, 1-45

Romains 8, 8-11

« Notre résurrection »

Le passage que nous venons de lire de l'Évangile de Jean nous raconte la résurrection par l’entremise de Jésus d’un homme, un homme réellement et complètement mort. Et cela nous conduit tout de suite à nous poser une question. Si Jésus ressuscite son ami mort, pourquoi ne fait-il pas un petit miracle de temps en temps pour ceux que j’aime, qui sont malades et que je lui recommande, sans parler de ceux qui sont morts? Cela n’arrive quasiment jamais et pourtant l’Eglise Catholique enquête soigneusement pour vérifier l’authenticité de tous les cas supposés. Et malgré tout, je crois que Christ est source de miracles dans nos vies. Mais probablement pas des mêmes miracles et il vaut la peine de bien chercher, dans ce récit spectaculaire du retour à la vie de Lazare, quel est le message. Ce récit est assez long car Jean a pris la peine de faire plusieurs parenthèses qui ne sont pas là pour rien. Elles apportent des indices qui nous aident à comprendre quels miracles, quelle résurrection Dieu nous offre.

Le premier indice est cette curieuse petite parabole où Jésus parle de marcher de jour ou de nuit La conclusion de Jésus à cette petite parabole est : « Si quelqu'un marche pendant la nuit, il trébuche parce que la lumière n'est pas en lui. ». La question essentielle est donc, selon Jésus, d'avoir « la lumière » « en soi-même ». Le salut dont il est question ici n'est pas matériel mais spirituel! L'essentiel nous dit Jésus c'est d'avoir « la lumière » à l'intérieur de soi. Le salut est comme une lumière mais cette lumière n'est pas physique, elle est spirituelle, elle ne nous éclaire pas de l'extérieur, mais le projet de Dieu est de rendre chaque personne clairvoyante, il cherche à nous rendre même lumineux, pour que nous soyons même, pour notre part « la lumière du monde » comme nous l’avons vu il y a quelques mois dans Matthieu 5.

Un second indice nous invite un peu plus loin à comprendre ce récit de façon spirituelle : Jésus parle avec Marthe de la résurrection, ce qui est bien utile pour nous préparer à comprendre le miracle qui va suivre. Jésus dit : « Je suis la résurrection et la vie. Celui qui croit en moi vivra même s'il meurt, et quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais » . Comment peut-on comprendre cela ? Le terme de « résurrection » fait dévier notre imagination. Alors que, dans le texte, il n'y a bien sûr que le mot tout simple et tout quotidien de « se mettre debout » comme on se lève le matin de son lit ou qu'on se lève de table. Et l’on pourrait récrire ainsi la phrase de Jésus : « Je suis venu pour vous redresser, vous mettre debout et vous faire vivre aujourd’hui une vraie vie, plus forte que la mort »

Et la clé, c’est cette question qu'il nous pose ici : « Crois-tu cela ? » ou plus précisément : « Fais-tu confiance ? » car c’est le sens réel du verbe utilisé ici Il est bien sûr difficile d'imaginer et à plus forte raison de croire à une vie éternelle, mais on peut plus facilement « faire confiance » en cette résurrection dont parle ici Jésus. Et c’est un fait d’expérience, partagée par des milliards de gens, que Dieu est source de vie et d'élévation, ou source de relèvement quand nous sommes tombés.

C'est donc possible, oui, de faire confiance en Dieu comme une force qui met l’homme debout. Même celui qui n’a jamais vécu cela peut au moins se poser des questions face à tous ces témoignages, et commencer à avoir un début d’espérance… et cette espérance-là est déjà une sorte de confiance en Dieu.

La résurrection dont parle ici Jésus est pour nous et pour nous aujourd’hui, nous dit ce récit. Or, nous sommes tous plus ou moins malades quelque part mais nous ne sommes quand même pas morts. S'il nous faut ressusciter aujourd'hui d'entre les morts, cela ne peut être qu’au sens spirituel, existentiel et moral.

Et c’est bien ce que Jésus entend par résurrection ; c'est un processus spirituel qui nous donne la vie. Un processus qui nous permet de traverser des difficultés multiples, comme la peur , ou le sentiment que notre vie n’a aucun but, ou une certitude de culpabilité, une souffrance, une solitude qui nous enferme , sans foi, sans espérance, sans que nous arrivions à aimer ni à nous laisser aimer...

Dans ce cadre où la résurrection est une question spirituelle plus que physique, que vient faire ce récit de la résurrection, je dirai plutôt la réanimation de Lazare ? Jésus le dit à deux reprises, cette réanimation de Lazare est un excellent signe qui nous est donné pour que nous ayons confiance , et qu'en ayant confiance nous nous ouvrions à ce processus de résurrection.

Si la résurrection est un événement à vivre dans ce temps présent, si c'est bien cette vie spirituelle qui est l'essentiel, quelle autre raison pouvait avoir Jésus pour réanimer Lazare? Qu'importe, effectivement, sur le plan de la vie éternelle, que le corps de Lazare soit vivant ou mort. Cela ne change rien à sa vie profonde, ce qui est vivant reste vivant, ce qui ne l'est pas ne l'est toujours pas. C'est vrai, que pour Jésus, la vie spirituelle est l'essentiel, mais en réanimant Lazare il montre que la vie en ce monde a quand même vraiment de l'importance. D'abord parce qu'il y avait des gens qui vivaient, eux, en ce monde et qui aimaient Lazare : ses sœurs, Jésus et ses autres amis, ce n'est pas rien. Et puis la vie en ce monde a pour vocation à être belle. Elle l'est par le seul fait de vivre, de respirer, elle l'est aussi les uns par les autres.

C'est peut-être la meilleure raison qui pousse Jésus à réanimer Lazare, la compassion pour ses sœurs, et puis aussi sa propre peine de perdre cet ami.

Mais, comme chaque événement raconté dans l'Évangile, cette réanimation est le signe d'une réalité spirituelle. Jean le dit lui-même au dernier verset de son évangile (20,31): tout ce qu'il a écrit doit être compris comme un signe donné « pour que nous croyons que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et qu'en croyant nous ayons la vie en son nom ». La réanimation de Lazare a donc pour objectif de nous ressusciter nous-mêmes, comme Marthe ressuscite en faisant confiance à Jésus comme Sauveur, comme Fils de Dieu. Cette réanimation de Lazare a ainsi une portée pédagogique, elle est un message qui nous est adressé. C'est pour nous que Jésus prie son Père à haute voix, nous dit le texte, pour montrer "que c'est Dieu qui l'a envoyé ". D'ailleurs, comme Jésus le dit au début : "Cette maladie ne mène pas à la mort, mais elle est pour la gloire de Dieu, afin que le Fils de Dieu soit glorifié par elle." La maladie et la guérison de Lazare par Jésus sont ainsi comme un signe de notre propre état de mort et de l'importance ultime du Fils de Dieu pour que nous ressuscitions maintenant, que nous recevions aujourd'hui cette vraie vie que Dieu donne à l’homme, par amour.

Cette histoire est à comprendre comme un signe qui nous concerne directement, un signe d’une résurrection spirituelle qui nous est offerte, comme un miracle, comme une chose inouïe que nous ne saurions espérer, mais que Dieu rend possible.

Les gestes de Jésus n'ont pas pour objectif d'épater les gens, mais ils sont à interpréter comme évoquant une réalité profonde, celle de la vie que Dieu donne. La réanimation de Lazare est temporaire, c'est un geste relativement anecdotique pour nous, mais c'est un geste immense s'il est compris comme montrant que la résurrection est offerte à l'humanité, résurrection que Marthe va vivre ce jour-là.

Ce geste est immense car il dit la compassion de Dieu, il dit la force de l'amitié pour secourir, pour réanimer et même pour offrir la résurrection à ceux que nous aimons. Ce geste de Jésus montre que Dieu ne se découragera pas de venir ouvrir les tombeaux de notre égoïsme, de nos manques de foi ou d'espérance, même si nous y sommes enfermés depuis des jours et des jours, Dieu ouvre nos tombeaux et nous appelle à en sortir.

Amen

Jean Jacques Veillet