Prédications Protestantes dans les Alpes du sud 

DIMANCHE 2 Avril 2017

Trescléoux (05700)

Lectures du Jour :

Ézéchiel 37, 12-14 (voir également sous cette référence, méditation du 29 Mars 2020)

JEAN 11, 1-45

Romains 8, 8-11

Crois-tu cela ?

Des signes

Que nous dit Jean, l’évangéliste ? Dans son prologue[1], qu’il faudrait relire régulièrement, que Jésus n’est pas un homme choisi par Dieu, mais qu’il est le Fils éternel du Dieu vivant.

Et Jean nous écrit ces choses[2] afin que nous croyions que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et qu'en croyant nous ayons la vie en son nom. Et pour cela, tout au long de la 1° partie de son évangile[3], il nous donne des signes, le premier, dès le chapitre 2, aux noces de Cana : Tel fut, à Cana en Galilée, le premier des signes miraculeux que fit Jésus.

Jean nous donne 7 signes[4], pas un de plus, le dernier étant la résurrection de Lazare par Jésus, juste avant sa montée vers Jérusalem et son accueil triomphal le dimanche des Rameaux, d’où l’opportunité de lire ce texte en ce 5° dimanche de Carême.

Mais il ne faut pas voir dans ces prodiges, miracles, des performances pour attester la divinité de Jésus, l’enjeu n’est pas là : il s’agit de signes qui veulent dire autre chose, qui veulent dire que Jésus est le seul à pouvoir donner, redonner la Vie, une Vie nouvelle, fondée sur notre réconciliation avec Dieu le créateur devenu le Dieu Sauveur.

Marthe et Marie : 2 attitudes face à la mort

Et dans le texte de ce matin, nous retrouvons 3 personnages dont nous avons fait la connaissance chez Luc :

* Marthe et Marie[5], recevant le Seigneur chez elles, Marthe, occupée à divers soins domestiques, prenant ombrage de ce que sa sœur, assise aux pieds du Seigneur boive ses paroles et son enseignement, tandis qu’elle est seule pour cuisiner, servir, etc...

* Lazare, présenté par Luc comme « le pauvre », et l’homme riche[6], la conclusion de cette parabole, formulée par Jésus à plusieurs reprises étant que celui qui s’élève sera abaissé et celui que l’on a abaissé sera élevé.

Chez Jean, Marthe et Marie sont à rôles inversés : A la vue de Jésus, elles prononcent exactement la même phrase, mais qui exprime deux sentiments contradictoires :

* Marthe, qui va au-devant de Jésus et l’accueille par ce Seigneur, si tu avais été ici mon frère ne serait pas mort et elle enchaîne tout de suite : mais même maintenant je sais que tout ce que tu demanderas à Dieu, Dieu te le donnera.

Marthe n’écoutait pas trop les enseignements de Jésus lorsqu’il était chez elles, mais cela ne l’empêchait pas d’avoir foi en Lui, une confiance bien accrochée, inaltérable, même dans des circonstances aussi tragiques que la perte du frère, une foi de charbonnier toute simple.

* Marie, personnage un peu plus complexe, dont la foi est plus émotionnelle, reste dans la maison, murée dans son chagrin. Elle accueille Jésus par la même phrase Seigneur, si tu avais été ici mon frère ne serait pas mort, suivie d’un silence lourd de reproches : Pourquoi n’est-tu pas arrivé plus tôt ? Lourd de doutes : celui qui donné la vue à un aveugle quelques jours plus tôt n’a pas su empêcher Lazare de mourir ?

Lourd aussi de reproches à nous-mêmes : cette absence apparente du Seigneur, cette non réponse à mes prières, n’est-ce pas mon manque de foi qui en serait la cause ?

Dans ces circonstances tragiques la mort est toujours vécue comme un échec, une défaite, pouvant susciter non seulement chagrin mais aussi révolte, rejet de celui à qui l’on pensait être attaché définitivement ?

Il arrive ainsi souvent que notre foi soit mise « à l‘épreuve des épreuves traversées ».

Ce récit de la résurrection de Lazare a été écrit pour répondre aux doutes, voire même à la révolte des chrétiens de la 1ère génération qui voyaient leurs frères mourir, alors qu’ils attendaient le retour imminent du Seigneur.

Ce récit nous parle à nous aussi aujourd’hui, de plusieurs manières :

Rencontrer Jésus

Au cours de la brève conversation qu’il tient avec Marthe, Jésus essaie de lui faire comprendre que ce qui est en jeu, ce n’est ni une hypothétique immortalité de l’âme[7], ni de croire seulement en une résurrection après la mort[8], mais que cette résurrection ne s’obtient que si l’on vit en Christ, ici et maintenant, et que cela ne peut se produire que par une rencontre, concrète, physique avec Jésus, rencontre qui nous fait naître de nouveau et entrer dans le Royaume de Dieu au moment même où nous le rencontrons. Alors seulement nous serons au bénéfice de cette promesse d’une résurrection avec Lui lors des fins dernières.

L’ami « fidèle et tendre »

S’il est le Fils de Dieu, Jésus n’en est pas moins totalement homme[9], sujet aux mêmes émotions que nous : il frémit, il pleure avec Marie, il s’indigne devant cette victoire apparente de la mort. Cette mort de Lazare qui annonce sa propre passion, cette mort à laquelle il sait qu’il lui faudra bientôt se livrer, mais dont il sortira victorieux par la puissance de Dieu.

Voilà pourquoi Jésus peut partager nos souffrances, compatir à nos douleurs, pleurer avec nous et nous consoler, selon sa promesse et que le brésilien Adémar de Barros décrit si bien dans son poème Des pas sur le sable (voir infra).

Lazare : le retour à la vie

Cette résurrection de Lazare, ce 7° signe, n’est en réalité pas une résurrection, mais un retour à la vie :

A Lazare, mort[10], enfermé au fond de sa grotte, Jésus, après avoir rendu grâces, comme il le fera si souvent, ordonne : Lazare, sors dehors (v.43).

De ce face à face avec Jésus, de cette rencontre ultime, Lazare va non pas ressusciter mais naître de nouveau, voilà l’illustration claire de cette expression, qui trouve ici toute sa pertinence. La résurrection, c’est pour plus tard, mais dès cette rencontre nous pouvons espérer, nous projeter dans cette vie éternelle où nous rejoindrons Notre Seigneur.

Ce récit du retour à la vie de Lazare, placé en ce dernier dimanche de Carême ne peut que nous préparer à célébrer la résurrection de Jésus lui-même, mais entre ces 2 événements, il y a 2 différences de taille :

* Tout d’abord, Lazare n’a pu sortir de sa grotte que par l’intervention de ses amis, qui roulent la pierre, et par l’ordre de Jésus. Lorsque Jean et Pierre arrivent au sépulcre, celui-ci est déjà vide ;

* Ensuite, c’est une momie qui sort du tombeau, et il faut que Jésus dise : ôtez lui ses bandelettes (v.44). Lorsque Jean et Pierre arrivent au sépulcre, les linges sont déjà pliés soigneusement sur la margelle.

Conclusion

Lazare n’est qu’un homme ordinaire, Jésus est le Fils de Dieu. Il a en Lui cette force immanente qui n’a besoin de personne pour accomplir sa volonté. La mise en perspective de ces deux scènes ne peut que nous renforcer dans cette conviction et manifester la Gloire et la puissance Divines.

Mais c’est aussi aux hommes et femmes d’aujourd’hui que Jésus lance cet ordre : Sortez de vos grottes obscures où vous vous réfugiez, où vous êtes déjà morts sans le savoir, venez à la Lumière, revenez vers moi, revenez à la Vie, une Vie Nouvelle, en harmonie avec mon enseignement, et je vous conduirai le moment venu vers la Vie Eternelle en la présence bienveillante de Dieu le Père.

Forts de cette promesse, notre propre résurrection se présente devant nous (v.40), mais elle n’est acquise qu’à ceux qui par l’expérience de cette rencontre personnelle avec Jésus naîtront de nouveau et recevront pour eux cette Parole :

Celui qui croit en moi, vivra quand bien même il serait mort, celui qui vit en moi, celui-là, a la vie éternelle. (v.26)

Jésus dit à Marthe, Jésus nous dit ce matin : Crois-tu cela ?

Et l’on se rappellera le verset final qui conclut l’Evangile de Jean : «Heureux ceux qui n’ont pas vu et qui ont cru » (Jn 20, 29).

Amen !

François PUJOL

Des pas sur le sable


Une nuit, j’ai eu un songe.


J’ai rêvé que je marchais le long d’une plage, en

compagnie du Seigneur.

Dans le ciel apparaissaient, les unes après les autres,

toutes les scènes de ma vie.

J’ai regardé en arrière et j’ai vu qu’à chaque

scène de ma vie, il y avait deux paires de traces sur le sable:

L’une était la mienne, l’autre était celle du Seigneur.

Ainsi nous continuions à marcher, jusqu’à ce que tous

les jours de ma vie aient défilé devant moi.

Alors je me suis arrêté et j’ai regardé en arrière.

J’ai remarqué qu’en certains endroits, il n’y avait

qu’une seule paire d’empreintes, et cela correspondait

exactement avec les jours les plus difficiles de ma vie,

les jours de plus grande angoisse, de plus grande peur

et aussi de plus grande douleur.

Je l’ai donc interrogé : " Seigneur… tu m’as dit que tu

étais avec moi tous les jours de ma vie et j’ai accepté

de vivre avec Toi. Mais j’ai remarqué que dans les pires

moments de ma vie, il n’y avait qu’une seule trace de pas.

Je ne peux pas comprendre que tu m’aies laissé seul

aux moments où j’avais le plus besoin de Toi. "

Et le Seigneur répondit : " Mon fils, tu m’es tellement

précieux ! Je t’aime ! Je ne t’aurais jamais abandonné,

pas même une seule minute !

Les jours où tu n’as vu qu’une seule trace de pas sur le

sable, ces jours d’épreuves et de souffrances, eh bien :

c’était moi qui te portais. "

Ademar de Barros

[1] Jean 1,1-14

[2] Jean 20,31 : les miracles et prodiges que Jésus a accomplis.

[3] Les chapitres 1 à 12

[4] Eau changée en vin à Cana (2,1-11), Guérison du fils de l'officier royal à Cana (4,46-54), Guérison du paralytique à la piscine de Bethesda (5,1-15), Miracle des pains en Galilée (6,1-15), Marche sur la mer de Galilée (6,16-21), Guérison de l'aveugle à Jérusalem (ch. 9), Résurrection de Lazare (ch. 11)

[5] Luc 10, 38-42

[6] Luc 16, 19-31

[7] Selon la philosophie grecque de l’époque, dominante dans le bassin méditerranéen

[8] Selon la croyance des pharisiens, ce qui les opposait aux sadducéens

[9] Voir « l’Hymne aux Philippiens » (Phil 2, 6-11)

[10] Si Jésus a attendu 4 jours (v.39), c’est pour qu’il n’y ait aucune ambiguïté : les juifs pensaient que durant 3 jours, l’âme du défunt cherchait à rentrer dans son corps, et que le 4° jour, elle repartait définitivement.