Prédications Protestantes dans les Alpes du sud 

Jeudi 22 Janvier 2009

Temple de St Laurent du Cros-05500 (1)

Lectures du Jour :

Ézéchiel 37, 15-19 / 22-24a

Romains 8, 18-25

Jean 17, 8-11

La Prière Sacerdotale

Frères et sœurs,

Dans le texte de l’évangile pour cette semaine de prière pour l’unité des chrétiens, Jésus est à la veille de son arrestation, de son procès, de sa mort.

Il va bientôt déposer sa vie, et avant cela, il prie, pour ses disciples, ces hommes et ces femmes qui l’ont suivi, accompagné, et dont certains, trop ébranlés par la dureté des évènements vont aller jusqu’à le renier.

Il prie pour eux et les remet, ni plus ni moins, entre les mains du Père.

En faisant cela, déjà, il dépose sa vie.

Il demande deux choses essentielles à Dieu pour ses compagnons : qu’ils soient uns, et de ne pas les ôter du monde, où, lui-même les envoie à son tour pour témoigner.

Qu’ils soient un !

Qu’ils soient dans le monde !

Qu’ils témoignent !

Dans cet appel à l’unité, on peut voir, bien sûr, une invitation à maintenir une cohésion entre les différents groupes qui ne manqueront pas de se constituer, dès que lui, Jésus, aura quitté cette terre.

Qu’ils soient uns signifie alors que, dès lors que des groupes proclament avec ferveur et conviction, et dans la vérité, que Jésus est le Fils de Dieu, alors, leurs différences d’approche de la foi, leurs modes d’expressions aussi variées soient-ils, leurs relation à Dieu sont avant tout des richesses à partager, des ouvertures sur la diversité ; tant que le cœur, Jésus Christ, et le salut qu’Il nous offre, sont-eux même solidement au centre, cette unité dans la diversité peut se vivre.

Mais on a pu voir parfois aussi dans cet appel à l’unité une sorte d’invitation un peu sectaire à se replier sur soi, l’unité étant alors première par rapport au message et au témoignage, unité devenant unicité : unicité de témoignage, unicité de confession de foi, unicité de morale. Le regroupement se fait alors par affinité, et dès lors, par exclusion.

Je ne pense pas, bien sur, que Jésus imaginait ce genre de d’enfermement quand il appelait à l’unité.

Et puis, en parlant d’unité, On peut entendre quelque chose qui résonne en chacun d’entre nous, individuellement : un appel à l’unité intérieure.

Platon disait : « Gnosi seauton » connais-toi toi-même ».

On ne peut je crois parler d’unité avec les autres si en soi-même, l’unité n’y est pas …

Une unité intérieure qui est sans cesse mise en question par cette nécessité d’être à la fois « pas du monde » et « dans le monde ».

Comment être « dans le monde », et se garder de ce que Jésus appelle le « Mauvais », qui peut nous atteindre et nous envahir à tout moment ?

Cette tension, c’est ce qu’on appelle l’éthique.

C’est cette question continuelle qui nous traverse devant la plupart des grands choix de nos vies : devant telle situation, face à telle contrainte, quel est le bon chemin ?

Parfois il y a entre nous, les chrétiens, des fossés sur notre manière de gérer notre propre éthique, ou morale. Nos choix.

Certains se tourneront vers les écrits de leur hiérarchie ; d’autres voudront trouver dans la Bible une réponse à tous leurs choix et toutes leurs questions…

Y a-t-il une morale chrétienne ?

L’éthique ne se fait-elle pas au quotidien, dans un continuel aller-retour entre nous et Dieu, dans la prière?

Dès lors, être « uns » soi-même, c’est arriver, le moins mal possible, à résoudre la plupart de nos conflits éthiques, dans une relation de confiance avec Dieu.

Au fonds, une relation qui ressemblerait fort à cette confiance et cet abandon dont témoigne le Christ dans sa prière quand il remet ses disciples entre les mains de son père.

La Bible d’ailleurs ne regorge-t-elle pas d’exemple où des mauvais choix éthiques apparents de la part des hommes ont finalement été validés par Dieu pour la suite de cette histoire entre lui et son peuple ?

Cela n’est pas bien sûr de ma part une incitation à nous laisser aller à la plupart de nos bas instincts, mais bien une manière de nous rappeler qu’être « pas du monde » et « dans le monde », c’est avant tout, chacun et tous ensemble en tant que chrétiens, vivre une relation vivante et originale avec un Dieu qui ne veut pas de nous comme des pantins, mais comme des témoins actifs, et dans la vie !!!

Le Christ, et à sa suite Paul, et bien d’autres encore affirmeront que le témoignage rendu à Dieu peut se faire dans la démonstration que la faiblesse parfois triomphe de la force la plus absurde.

Et ce qui fait le lien, pour nous, entre l’être « pas du monde » et « dans le monde », c’est certainement le témoignage !

« Comme tu m’as envoyé dans le monde, moi aussi je les envoie dans le monde » dit Jésus à son père !!

Notre colonne vertébrale, la passerelle entre le monde et nous, entre le monde et Dieu en nous, c’est la manière dont nous rendons compte, pour les autres, et dans la joie de ce qui se joue, pour nous et pour le monde, dans cette rencontre.

A chaque fois que je témoigne, par ma vie, par mes mots, que le malheur, pour moi n’a pas le mot ultime, je rends compte de cette relation vivante en moi.

A chaque fois que je témoigne, dans mes actes et dans mes paroles, que la misère de l’autre n’est pas, pour moi, une fatalité, je rends compte de cette relation, vivifiante, pour le monde.

A chaque fois que je témoigne de ce que ma vie, mon être profond, ne se résume pas à mes seuls actes, fussent-ils les pires, je rends compte que le monde ne m’a pas complètement réduit en esclavage.

Dans tous ces moments et dans bien d’autres encore, je peux signifier, je peux « faire signe » pour l’autre, de ce que Dieu, dans ma vie, ne me met pas hors du monde, mais me rend au contraire à ma pleine humanité, au sens de celle que le Christ a partagée avec nous.

Frères et sœurs, si ensemble nous comprenons que nous avons « seulement » à vivre de cette relation au Christ, « seulement » à témoigner de cette relation, alors, nous laisserons Dieu faire en chacun de nous l’unité qu’il espère, et nous démontrerons alors que cette unité peut nous déborder, jusqu’à devenir visible dans nos communautés, puis, chemin faisant, gagner, du terrain au-delà de nous !

Témoignons donc de la joie qui naît de l’unité retrouvée en nous entre le monde et Dieu. Et bientôt nous serons des chrétiens unis pour témoigner ; c’est là notre vocation.

Amen !

Pr Nathalie Paquereau.

(1) : Célébration œcuménique de la semaine de prière pour l’unité des chrétiens